L’Oeil de la photographie : Le questionnaire : Christophe Beauregard par Carole Schmitz

Christophe Beauregard : Explorer les identités

Christophe Beauregard est reconnu pour son approche conceptuelle et son exploration des identités contemporaines à travers le prisme de la société de consommation et des médias. Travaillant principalement dans le domaine du portrait, il se distingue par sa capacité à questionner la manière dont les individus se construisent et se présentent dans un monde façonné par les images et les normes sociales.

Hyacinthe, 2017. Série Sari © Christophe Beauregard

Le travail de Christophe Beauregard se situe à l’intersection de l’art et du documentaire, avec une démarche qui mêle critique sociale et esthétique soignée. Ses photographies sont souvent marquées par une mise en scène rigoureuse, où chaque détail est soigneusement orchestré pour créer une image qui interpelle et déstabilise. Il explore des thèmes tels que l’apparence, le masque social, et la construction de l’identité, en jouant sur les codes visuels de la publicité et des médias.

L’un des aspects les plus frappants de son travail est la manière dont il utilise le portrait pour révéler des contradictions internes et des tensions sous-jacentes chez ses sujets. Il est particulièrement intéressé par la manière dont les individus se transforment ou se travestissent pour répondre aux attentes extérieures, qu’il s’agisse des normes de beauté, des rôles de genre, ou des exigences professionnelles. Ses photographies soulignent souvent l’artificialité de ces constructions, tout en mettant en lumière la vulnérabilité des sujets face à ces pressions.

Darkness, 2011. Série Pentimento © Christophe Beauregard

Christophe Beauregard a travaillé sur plusieurs séries photographiques marquantes, dont certaines se penchent sur des phénomènes sociétaux spécifiques, tels que la chirurgie esthétique ou les pratiques du coaching professionnel. Ses œuvres sont souvent présentées dans des expositions et des publications qui abordent des questions de société, contribuant ainsi à un débat plus large sur l’identité et la représentation dans le monde moderne.

Philippe, 2012. Série Le meilleur des mondes © Christophe Beauregard

En outre, il collabore régulièrement avec des institutions culturelles, des magazines, et des marques, en appliquant sa vision unique pour produire des images qui allient réflexion critique et impact visuel. Son approche artistique a été saluée pour sa capacité à capturer la complexité de la condition humaine dans un contexte où l’image joue un rôle central dans la construction de soi.

Christophe Beauregard continue d’explorer les frontières entre le réel et le fictif, utilisant la photographie comme un outil pour questionner et décomposer les réalités contemporaines. Ses œuvres, souvent intrigantes et provocantes, restent gravées dans l’esprit des spectateurs, invitant à une réflexion sur la manière dont nous nous percevons et sommes perçus dans la société d’aujourd’hui.

Gilbert & Georges © Christophe Beauregard

Actualités :

Votre premier déclic photographique ?
Christophe Beauregard
 : Des images de paysages

L’homme ou la femme d’image qui vous a inspiré ?
C.B.
 : August Sander.

L’image que vous auriez aimé prendre ?
C.B.
 : Il y en a beaucoup. Mais spontanément, je pense à une image de Jeff Wall. Il s’agit d’une mise en scène avec un homme en position de tir derrière une voiture. Elle m’a beaucoup marqué.

Celle qui vous a le plus ému ?
C.B.
 : Un clown fumant une cigarette de Bruce Davidson.

L'auguste au pistolet, Pinder 1993 © Christophe Beauregard photographs

Et celle qui vous a mis en colère ?
C.B.
 : Une photo de Kévin Carter prise au Soudan et montrant un enfant très affaibli souffrant de malnutrition avec un vautour en arrière-plan. C’est une image d’une puissance symbolique sans pareil, qui a suscité beaucoup de polémique car on disait que le photographe semblait attendre que le vautour s’attaque à l’enfant. Ce qui n’étant nullement son intention car il voulait simplement pour témoigner de la famine qui frappait cette région. L’impact de cette image a été phénoménal et lui a valu le prix Pulitzer mais également des critiques acerbes. Certains l’ont traité de charognard. Il ne s’en est jamais remis et s’est suicidé quelques mois plus tard.

Quelle photo a changé le monde ?
C.B.
 : Il y en a deux : La première est celle de Niel Armstrong posant le pied sur la Lune, et ensuite celle, ou toutes celles devrais-je dire, montrant les attaques du Wall Trade Center le 11 septembre 2011, et particulièrement celle de cet homme que l’on voit se défenestrer.

Et quelle photo a changé votre monde ?
C.B.
 : Une image de Diane Arbus : « Albino Sword Swallower at a Carnival ».

Qu’est-ce qui vous intéresse le plus dans une image ?
C.B.
 : Ce qu’elle provoque en moi.

Rangermysterio, 2010. Série Devils In Disguise © Christophe Beauregard

Quelle est la dernière photo que vous avez prise ?
C.B.
 : Mon fils Hugo, le petit dernier.

Qu’est-ce qui fait une bonne photo ?
C.B.
 : Une composition et un cadrage fort. Et ensuite la manière dont est construite l’image qui amème à diverses sensations qu’elles soient physiques, émotionnelles ou autres.

Et qu’est ce qui fait un bon photographe ?
C.B.
 : Son œil sur les choses.

L'homme au chien, 2008. Série Semantic Tramps, 2008

La personne que vous aimeriez ou auriez aimé photographier ?
C.B.
 : Richard Prince.

Par qui aimeriez-vous ou auriez-vous aimé être photographié ?
C.B.
 : Richard Avedon.

Un livre photos indispensable ?
C.B.
 : « Magazine Work », le livre réunissant les portraits de presse réalisés par Diane Arbus. Il y en a également un autre que j’aime particulièrement : « Irving Penn photographs a donation in memory of Lisa Fonssagrives-Penn ». Il m’a été offert par Gilles Decamps dont j’ai été l’assistant.

L’appareil photo de votre enfance ?
C.B.
 : Un Canon AE1

Celui que vous utilisez aujourd’hui ?
C.B.
 : Hasselblad 503 CW

Série Sari, 2018. © Christophe Beauregard

Un projet à venir qui vous tient à cœur ?
C.B.
 : Une résidence à Ajaccio en Corse l’été prochain.

Votre drogue préférée ?
C.B.
 : Le portrait, les bretzels et le vin rouge.

La meilleure façon de déconnecter pour vous ?
C.B.
 : Lire.

Quel est votre rapport à l’image ?
C.B.
 : Mon rapport à l’image est très lié à mon père qui était un photographe amateur et qui m’a appris ce qu’était le cadre.

Une image pour illustrer un nouveau billet de banque ?
C.B.
 : Une fusée.

Quelle est la question qui vous fait déraper ?
C.B.
 : Ce serait davantage une réflexion qui entraverait ma liberté de penser ou d’agir qui me ferait déraper.

L’endroit dont vous ne vous lassez pas ?
C.B.
 : La mer.

Votre plus grand regret ?
C.B.
 : Ne pas avoir pour l’instant de maison au bord de la mer. Et d’un point de vue professionnel de ne pas encore avoir eu d’exposition dans une institution photographique.

En termes de réseaux sociaux, êtes-vous plutôt Instagram, Facebook, Tik Tok ou Snapchat et pourquoi ?
C.B.
 : Instagram car c’est à mon sens le seul réseau qui laisse la part belle à l’image.

Couleur ou N&B ?
C.B.
 : Couleur.

Lumière du jour ou lumière studio ?
C.B.
 : Les deux.

Quelle est, selon vous, la ville la plus photogénique ?
C.B.
 : Rome.

Si Dieu existait, lui demanderiez-vous de poser pour vous ou opteriez-vous pour un selfie avec lui ?
C.B.
 : Un selfie.

Si je pouvais organiser votre dîner idéal, qui serait à table ?
C.B.
: Ma femme, le Directeur de la MEP (Maison Européenne de la Photographie), Richard Avedon, Diane Arbus, Simone Veil et Barack Obama.

Simone Veil, Paris 2005.

L’image qui représente pour vous l’état actuel du monde ?
C.B.
 : Une image qui à la fois montrerait une montée de l’extrémisme et de l’individualisme. Ce serait sans nul doute une image très violente.

Si vous deviez tout recommencer ?
C.B.
 : Je commencerais mon travail artistique bien plus tôt.

Un dernier mot ?
C.B.
 : Matière.

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